13.6.2025
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Les lunettes teintées ne sont pas nées sur les plages de la Côte d’Azur. Dans la Chine antique, les juges en portaient pour cacher leurs émotions. Il faudra attendre le XXe siècle pour qu’elles deviennent ce qu’on connaît aujourd’hui ? D’abord réservées aux pilotes et sportifs, elles finissent sur le nez de tout le monde, des stars aux passants du dimanche.
Mais pour les personnes aveugles ou malvoyantes, ces lunettes ne sont pas une question de look. Elles sont une aide technique, un filtre protecteur, un signal social. Un objet multifonction bien plus utile qu’il n’y paraît.
Mathieu Froidure, non-voyant, le rappelle dans une vidéo publiée sur LinkedIn. Face à une question qu’on lui pose souvent “Une personne aveugle porte-t-elle toujours des lunettes de soleil ?” il explique avec simplicité que ces lunettes font partie de son quotidien. Non pas pour faire joli, mais parce qu’elles répondent à un besoin d’accessibilité.
La vision est codifiée par notre chère administration comme plein d’autres sujets ! Un aveugle est une personne qui a une vision binoculaire résiduelle inférieure à 1 vingtième. Toutes les personnes aveugles ne voient pas “rien”. Certaines distinguent des ombres, des formes ou des sources de lumière. C’est ce qu’on appelle la vision résiduelle.
La lumière est souvent la dernière vision résiduelle.
En France, près de 2 millions de personnes sont atteintes d’un trouble de la vision.Dans ces cas-là, la lumière peut vite devenir… l’ennemie.
Le soleil, les phares, ou ces néons de supermarché, tout ça peut éblouir, désorienter, voire franchement faire mal.
Mais qu’est-ce que la photophobie ? Avoir peur de la lumière ! et non, c’est une hypersensibilité à la lumière. Cette hypersensibilité en devient parfois même douloureuse.
Imaginez sortir de chez l’ophtalmo après un fond d’œil, avec les pupilles dilatées et marcher en plein soleil.
Cette hypersensibilité permanente vous amène une bonne raison de porter des lunettes de soleil même sous la pluie.
Et ce n’est pas qu’une affaire de lumière. Le besoin de contraste est tout aussi important. Un texte noir sur fond blanc, c’est lisible. Un texte gris clair sur fond beige ? C’est un jeu de piste.
La lumière et le contraste vont ensemble, si l’un manque, ce n’est pas terrible.
Même en l’absence de perception visuelle, les lunettes ont leur utilité. Elles protègent le visage des dangers invisibles comme les branches d’arbres, le mobilier urbain, la poussière…
Se déplacer à l’aveugle, c’est un peu comme traverser un parcours d’obstacles permanent. Les lunettes ? Ce sont les pare-chocs du visage.
Mais elles ont aussi une fonction sociale. Elles permettent de signaler discrètement qu’une personne est non-voyante. Car, une personne qui ne répond pas à votre regard ou à votre signe n’est pas impolie… elle ne vous voit peut-être pas.
Les lunettes deviennent alors un outil de communication silencieuse, qui évite les malentendus et favorise une inclusion fluide et naturelle.
Il n’existe pas une seule bonne façon d’être autonome quand on est aveugle. Il n’y a pas une méthode officielle, ou un outil obligatoire à cocher pour “faire comme il faut”. Ce qui compte, c’est que la personne puisse choisir ce qui lui convient, dans un cadre qui lui en laisse la possibilité.
Certaines préfèrent une approche plus discrète, d’autres veulent maximiser leur sécurité. Certaines portent des lunettes teintées tous les jours, d’autres seulement quand elles savent que l’environnement sera inconfortable. Parfois, on change d’habitudes selon l’âge, la météo, l’énergie du jour, ou même l’humeur.
L’erreur, ce serait de croire que l’accessibilité est une recette à appliquer pareil pour tout le monde. C’est exactement l’inverse, c’est l’art d’ouvrir le champ des possibles, d’imaginer plusieurs façons de faire, pour que chacun puisse trouver la sienne.
L’autonomie n’est pas un produit fini. C’est un équilibre en mouvement, entre les besoins de la personne et les ressources disponibles autour d’elle.
Respecter les choix, c’est accepter qu’un outil qui semble “inutile” à nos yeux peut être indispensable pour quelqu’un d’autre.
C’est faire de la place à la diversité des expériences, sans chercher à les uniformiser.
Et au fond, c’est là que commence l’inclusion : pas quand tout le monde suit le même chemin, mais quand chacun peut emprunter le sien, en confiance.
Ce n’est pas la lumière le problème. C’est le fait qu’on oublie, trop souvent, que chacun la perçoit différemment. Ce qu’on appelle “accessibilité”, ce n’est pas rajouter des solutions à la fin, c’est penser les environnements dès le départ pour qu’ils accueillent toutes les façons de voir, de bouger, de comprendre.
Ce qui est confortable pour certains est parfois insurmontable pour d’autres et inversement. C’est là qu’intervient le vrai défi : faire en sorte que la norme soit inclusive, sans avoir à créer des chemins parallèles pour ceux qui ne rentrent pas dans les cases.
C’est exactement cette approche qu’on applique au quotidien chez Urbilog Compéthance EA. On conçoit, on teste, on adapte toujours avec ceux qui sont directement concernés. Pas de solution miracle, mais des méthodes solides (RGAA, WCAG, RAAM Urbilog, RAMU) et une idée simple : si ça fonctionne pour tout le monde, c’est que c’est bien pensé.
Alors oui, parfois, une paire de lunettes suffit à ouvrir les yeux sur un monde plus inclusif.
Encore faut-il que ce monde soit prêt à les accueillir.
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